Arbres de vie
ARBRES DE VIE
A Echauffour en Normandie,
J’avais un tilleul épanoui
Qui embaumait chaque printemps,
Découpant ses lentes ramures
Sur l’azur gris d’un ciel changeant.
A Starckenhofer, ton hameau,
Tu avais l’autre, son jumeau,
Solidement enraciné,
Géant paisible et doux dressé
Sur le socle de ta colline.
Fantôme de glace et d’argent
Aux doigts luminescents,
L’un se saupoudrait de neige
Pâle miroir d’un long hiver,
L’autre buvait pluies océanes.
Sans se connaître, ils se parlaient,
Gardaient nos jours, la nuit veillaient,
Pareils aux phares dans la brume,
Guides sur nos chemins ardus,
Ils nous semblaient presqu’immortels …
Entre saisons et cours du temps,
Fixité, et mouvement,
Sédentaires, ils essaimaient,
Chaque début d’été,
Confiant aux vents fleurs et semences,
Fécondité toujours à naître.
Un jour j’ai dû quitter le mien,
Tu es restée fidèle aux liens,
Noués en si longues années,
Mais ils nous ont donné la force
D’assumer le cours d’une vie
Semant talents et convictions.
Que ces arbres de jumelage
Entremêlent leurs lourds branchages
Tisserands de la paix, garants
De cette douce amitié
Qui nous unit depuis si longtemps
Bien chère Uta,
Je dédie ces quelques réflexions
Que tu traduiras en allemand
ARBRES
J’ai tant aimé les arbres,
Plissant leurs troncs,
Piliers profonds
Cathédrales
Végétales
Dressant leurs flèches verticales
Sur le vide sidéral,
Que je les enlaçais
Enfonçant mes ongles
Dans l’écorce rugueuse.
Chair marquée
Par les grands vents
Venus du large
O bêtes rugissant.
J’ai tant aimé les arbres
Ployant leurs branches
Alourdies de promesses
Collier de fleurs
Moissons de fruits
Ensemençant la terre
De l’or des germinations…
J’ai tant aimé les voir,
Horizons de mes yeux
Mesure de ma patience
S’endormir lourdement
A la fin des saisons,
Quand s’envole la feuillée pourpre
Portée par la bise d’automne,
Que j’en emporterai avec moi
Au blanc pays, quand m’en irai
Par un hiver tout bruissant
Du sanglot de mes vers.
PALME
S’élançant vers l’azur immaculé du jour
Le palmier s’évente,
Dans la découpe souple
Des feuilles déployées,
Peignant le vent marin
O palmes
Calmes
Musiques lentes et rythmées
Comme un cri silencieux
Dans la brûlure de l’été
Quand l’écorce laisse,
Ses lourdes nattes cannelées
Surgir de la vasque du fruit,
O palmes
Calmes
Patte d’éléphant
Engluée dans la terre,
L’arbre tend sa mouvance,
Exotique harmonie,
Sur la sérénité du ciel,
Paume la main qui a tracé les signes
Et les doigts inspirés
Découpant la feuillée des mots
Sur le vide blanc de la page.
FAGUS
A Bout de bras, à bout de branches
Un hêtre blanc tend sa ramure
A la lumière d’un clair matin,
Entrouvrant l’ombelle de sa parure belle
Émeraude surgie des bourgeons vernissés…
De ramilles en brindilles
La sève circule
Des veines de la terre,
Racines entrelacées
Où court le peuple ombreux
Au sommet de l’arbre
Pépiement d'oiselles
Feuillage de claire ombelle
Lançant sur le vide du jour
Son éphémère dentelle
Le temps d’un bref printemps.
LES HEURES
Et soudain la lumière
Fait son entrée en scène
En déchirant le voile
D’une aurore figée
Dans l’attente des heures
Qui n’en finissent pas
De dessiner le jour
Epousant le contour
Des terres craquelées
Où mûrissent les pins,
Ecorce grumelée,
Résine de soleil,
Orgie de miel liquide
Vibrant dans la chaleur…
Et plus rien n’existe
Et plus rien ne subsiste
Que la certitude
Que l’hébétude
Du temps, du jour, de celle
Qui les nomme, et les convie
Au pur banquet
De l’instant.
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